Les nouvelles orientations de la politique de développement française

samedi 3 août 2013

 

Le 31 juillet, Le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) s’est réuni pour la première fois depuis 2009, sous la présidence du Premier ministre et en présence de 15 ministres « concourant à la politique de développement » ainsi que de la directrice générale de l’Agence française de développement (AFD), Anne Paugam. Matignon précise que cette réunion marque « l’engagement du Gouvernement en faveur d’une politique de développement rénovée, plus cohérente, plus efficace et transparente, au bénéfice de nos partenaires du Sud et de l’influence de la France dans le monde ». Avec un budget de 3,1 milliards d’euros en 2013, la France est la 4e contributrice mondiale de l’aide au développement.

Dans le prolongement des Assises du développement et de la solidarité internationale, le Gouvernement souhaite définir de nouveaux principes et de nouvelles priorités en matière de politique de développement afin de l’adapter « aux défis du XXIe siècle, tels que la lutte contre la pauvreté et la préservation de la planète.

Dans le cadre de cette « rénovation » de la politique de développement, le Gouvernement a identifié quatre axes : la redéfinition des  priorités géographiques et sectorielles ; le renforcement de la cohérence de cette politique avec les autres politiques publiques ; mais également de la coordination de l’ensemble des acteurs du développement ; et enfin l’amélioration de « l’efficacité, de la redevabilité et de la transparence » de cette politique.

Une redéfinition des priorités géographiques et sectorielles 

Il s’agit tout d’abord de redéfinir les priorités géographiques et sectorielles, avec l’AFD comme « acteur pivot », notamment en faisant converger les Objectifs du millénaire pour le développement et l’agenda du développement durable et en concentrant l’aide « là où elle peut faire la différence ». La zone de solidarité prioritaire (ZSP) est supprimée et de nouveaux critères d’attribution des aides sont définis pour 2014, favorisant des « partenariats différenciés, reposant en particulier sur le niveau de revenu et la proximité géographique, culturelle et linguistique avec la France ».

Une liste des pays les plus pauvres vers lesquels sera concentrée la moitié des subventions a été établie : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Djibouti, Comores, Ghana, Guinée, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Tchad, Togo et Sénégal. La priorité sera portée sur l’Afrique subsaharienne et les pays voisins du Sud et de l’Est de la Méditerranée –  85 % de l’effort financier de l’État par le biais de touts les instruments disponibles, tels que les prêts bonifiés ou non, garanties ou autres financements innovants. Les pays en crise et en sortie de crise, tel que Haïti, bénéficieront également « d’une attention particulière » en ce qui concerne « leurs besoins en matière de développement humain, économique et d’approfondissement de l’État de droit ». Quant aux autres pays du monde – « majoritairement des pays à revenus intermédiaires à croissance rapide ou émergents » - la France souhaite y promouvoir une « croissance verte et solidaire », notamment avec des partenariats économiques, et les associer à la coopération internationale en faveur des pays les plus pauvres. Quant à la coopération avec les « très grands émergents » le CICID précise qu’il n’engendrera pas de coût financier pour l’État (hors expertise technique).

Une amélioration de la cohérence et un renforcement des principes transversaux

Le Gouvernement adopte notamment une nouvelle stratégie « genre et développement » pour la période 2013-2017, « pour mettre les droits des femmes au cœur de la politique de développement ». Elle sera évaluée chaque année par le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Et en 2017, 50 % des projets et programmes de l’aide française devront comporter un objectif d’amélioration de l’égalité  entre les femmes et les hommes.

Les domaines transversaux qui feront l’objet d’une action particulière seront l’agriculture et la pêche – une « agriculture familiale, protectrice de richesse et d’emplois et respectueuse des écosystèmes » qui constitue un « levier essentiel de la lutte contre l’insécurité alimentaire et la pauvreté » - « l’accès à l’éducation et le développement du capital humain », la santé - notamment via le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme dont la France est l’un des principaux donateurs – et la responsabilité sociale et environnementale des organisations et des entreprises œuvrant dans les pays en développement – avec notamment l’élaboration, dans l’année, d’un plan d’action par l’AFD.

Le Gouvernement a exprimé son attachement à la transparence dans le domaine des industries extractives – la France a annoncé son engagement dans le processus d’adhésion à l’ITIE en mai – à la transparence des flux financiers et la mobilisation des ressources domestiques ou encore au développement des financements innovants – telle que la taxe sur les transactions financières. La lutte contre le réchauffement climatique constitue également une priorité. Ainsi l’objectif de l’AFD est d’intégrer un « co-bénéfice climat » dans 50% des projets qu’elle finance et la France accueillera la négociation internationale sur le climat en 2015. Elle promeut, en outre, l’insertion des pays en développement dans les échanges commerciaux mondiaux, le renforcement des capacités des États en matière de sécurité intérieure et de justice, une politique migratoire cohérente, ainsi que les entreprises de l’économie sociale et solidaire.

Vers une plus grande coordination des acteurs du développement 

Un Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) est créé afin de favoriser le dialogue et la concertation avec la société civile et les collectivités territoriales. Alors que la coopération décentralisée représente déjà quelques 13 000 projets avec 147 pays, ces dernières sont appelées à jouer « un rôle croissant dans les dynamiques territoriales de développement. Quant aux ONG, elles voient la part le l’aide française transitant par elles doublée.

Le Gouvernement prône une coordination accrue des bailleurs - en particulier au niveau européen - l’élaboration d’une stratégie pour l’aide multilatérale d’ici la fin 2014, ainsi qu’un « renforcement de l’expertise française au service du développement ». Cette dernière préconisation s’accompagne de la création du fonds d’expertise technique et d’échanges d’expériences (FEXTE) doté de 20 millions d’euros au sein de l’AFD et d’une évaluation sur le dispositif français d’expertise technique internationale.

Une amélioration de l’efficacité, de la redevabilité et de la transparence des actions au service du développement

La France s’engage à mettre en œuvre les principes de l’aide au développement agréés au niveau international – notamment l’alignement sur les priorités et les procédures des pays partenaires et la gestion axée sur les résultats de développement - ainsi qu’à produire un rapport public sur les évaluations des résultats de l’aide public au développement tous les deux ans. Les efforts en faveur de l’accessibilité et de la lisibilité des informations relatives à cette aide seront également poursuivis via différents dispositifs comme la plateforme nationale data.gouv.fr. Un « projet pilote d’information des citoyens sur l’aide apportée au Mali » servira de test afin d’être éventuellement répliqué pour les autres « pays partenaires prioritaires ».

Le Gouvernement présentera, en novembre au plus tard, un projet de loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement et de solidarité internationale qui sera débattu par les parlementaires début 2014. Ce projet de loi permettra d’inscrire les nouvelles orientations définies par le CICID et s’appuiera sur les conclusions des Assises du développement du 1er mars, ainsi que sur les recommandations du Comité d’aide au développement, de l’OCDE, de la Cour des comptes et du Parlement.

Anne-Laure Chanteloup

 

Pour en savoir plus :

Relevé de décisions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement du 31 juillet 2013 (portail du Gouvernement)

Site de l'Agence française de développement

Le développement et la solidarité internationale en débat (par Anne-Laure Chanteloup, AllGov France)

Les Objectifs du millénaire pour le développement (Nations unies)

Zone de solidarité prioritaire (ministère des Affaires étrangères)

La France premier donateur européen du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme (par Anne-Laure Chanteloup, AllGov France)

Industries extractives : la France s'engage à la transparence (par Anne-Laure Chanteloup, AllGov France)

Les ambitions de "l'action extérieure des collectivités territoriales" (par Anne-Laure Chanteloup, AllGov France)

data.gouv.fr

Assises du développement et de la solidarité internationale (ministère des affaires étrangères)

Biographie de Jean-Marc Ayrault (AllGov France)

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